Palestine: Encore une victoire à
l'ONU alors que l'occupation se renforce sur le terrain
Trois
jours après le veto américain ayant bloqué une résolution au Conseil de
Sécurité traitant du statut de Jérusalem, l'Assemblée Générale des Nations
Unies vient d'adopter le 6 Décembre 2018 une résolution intitulée "Pour
une paix globale juste et durable au
Moyen-Orient"[1] par une majorité écrasant
de 156 voix, 6 voix contre et 12 abstentions. Cette résolution même si elle
n'est pas contraignante, elle réaffirme néanmoins au cours de cette conjoncture
particulière, que la question palestinienne demeure malgré tout, parmi les préoccupations
internationales.
Cette
résolution demande la fin de
l'occupation israélienne des territoires palestiniens depuis 1967 y compris Jérusalem-Est
et rappelle notamment la résolution 2334 adoptée en 2016 par le Conseil de
Sécurité. Elle fait également référence à la Conférence de Madrid qui se base
sur le principe de l'échange des territoires contre la paix, de l'initiative de
paix arabe et de la feuille de route du Quator.
Juste
avant l'adoption de cette Résolution, un projet condamnant le Hamas palestinien
a été initié par la délégation américaine. Un vote de procédure a été alors
exigé par le Koweit en sa qualité de Président du Groupe arabe demandant que la
majorité des deux-tiers soit appliquée pour le vote sur le projet américain.
Cette motion de procédure a été mise au vote et a obtenu le nombre de voix
nécessaires. Le projet américain qui a été mis par la suite aux voix sous la
règle des deux tiers, n'a pu été adopté faute de la majorité requise.
La
motion de procédure arabe constitue une démarche pertinente surtout que le
tableau des votes laisse deviner qu'une très forte pression a été exercée sur
"certains" Etats afin de chercher à tout prix une condamnation du
"Hamas". Le mouvement palestinien a échappé de justesse à sa catégorisation par
l'Assemblée Générale en tant que mouvement terroriste. Cela nous aurait renvoyé
encore une fois au débat ayant animé la Commission Juridique de l'ONU sur la
définition du terrorisme dans l'esprit de le différencier de la lutte légitime
pour recouvrer des droits spoliés comme cela est spécifié dans l'Article 51 de
la Charte des Nations Unies. Cet article garantit "le droit naturel de
légitime défense individuelle ou collective au cas où un membre des Nations
Unies est l'objet d'une agression armée" .
Il
est certain que le groupe arabe a réussi une prouesse de taille en demandant le
vote de procédure et en faisant "tomber" le projet américain. En revanche, cela ne doit en aucune manière
occulter le nombre de pays ayant soutenu le projet américain et qui a atteint un seuil inquiétant. Cela a d'ailleurs
permis au représentant israélien de considérer le vote en soi comme étant une
victoire, car selon lui, jamais la condamnation du Hamas n'avait auparavant réuni un aussi important nombre d'Etats[2].
Le
Hamas constitue indubitablement une partie intégrante du paysage politique de
la résistance palestinienne. Personne ne
peut nier cette réalité. Il revient ainsi aux palestiniens eux-mêmes de traiter
de cette question qui relève de leur souveraineté propre . Nous sommes
toutefois en "droit" de souhaiter voir les palestiniens agir en front
uni et solidaire, conjuguer leurs efforts afin que leurs querelles internes ne
soient pas un prétexte qu'Israël continuera d'y recourir pour crier à qui veut
l'entendre, qu'il ne trouve pas d'interlocuteur palestinien unique afin de
reprendre les négociations. J'estime que le résultat du vote de procédure
devrait faire l'effet d'un électrochoc susceptible d'inviter nos frères
palestiniens à plus de pragmatisme et à une sérieuse prise de conscience en
faveur d'une unité incontournable et salutaire pour leur avenir.
Si
nous décodons rapidement les votes du projet américain, on ne peut pas ne pas y
voir un signal d'alarme qui devrait être pris au sérieux. En fait, rien qu'en
comptabilisant les abstentions qui sont
de l'ordre de 33 et les non participations au nombre de 15, soit 48 Etats
membres, l'on ne peut être que plus inquiet, sachant que parmi ces derniers,
plusieurs "indécis" pourraient en d'autres occasions et à force de
pressions, "balancer" dans le
camp adverse. Cette réalité devrait ainsi inviter les palestiniens toutes obédiences
confondues, à se rallier autour de leur cause commune. Une fois leurs objectifs
atteints et leur Etat indépendant
établi, il leur sera alors possible de
jouir de tout ce que la démocratie pourrait leur offrir comme instruments et
artifices pour gérer et réglementer leurs affaires intérieures.
L'adoption,
le même jour, de la résolution traitant de la " paix globale, juste et
durable au Moyen-Orient" par une majorité écrasante des membres de
l'Assemblée Générale reste cependant un signal rassurant. Cette résolution
vient consolider les autres résolutions de l'Assemblée Générale et du Conseil
de Sécurité et notamment la résolution 2334 (2016) adoptée par le Conseil le 23 décembre 2016. Cette dernière réaffirme
la totalité des droits des palestiniens à un Etat indépendant, considère
illégales les implantations des colonies israéliennes et condamne toutes les
mesures visant à modifier la composition démographique, le caractère et le
statut du territoire palestinien occupé depuis 1967, y compris Jérusalem-Est.
Cette
importante résolution du Conseil de Sécurité adoptée 2016 a été elle-même
consolidée, une année après, soit le vingt-et-un décembre 2017 par la
résolution adoptée par l'Assemblée Générale à une majorité de 128 voix rejetant
la décision de l'administration américaine de considérer Jérusalem comme
capitale d'Israël[3] et qui "considère
nulle et non avenue" toute décision
ou action susceptible de modifier "le caractère, le statut ou la
composition démographique" de la ville de Jérusalem.
Ces
victoires juridiques sans cesse remportées par les palestiniens, renforcent
certes leur droit inaliénable à un Etat indépendant sur leur territoire
légitime, mais elles ne peuvent à elles seules matérialiser sur le terrain ce
que le droit international leur garanti ni ce qu'exigent les résolutions du
Conseil de Sécurité et de l'Assemblée Générale.
En
attendant que les palestiniens assainissent leur front intérieur afin de
renforcer leur statut d'interlocuteur international fiable et solide, ces
références onusiennes ainsi que les autres décisions prises par les différentes
instances internationales en faveur de leur cause, constituent de véritables
remparts contre les différentes tentatives d'atteintes à ces droits. Elles
constituent également des réponses cinglantes à tous ces courtiers qui croient pouvoir
marchander à leur guise et pour leur propre compte, l'avenir inaliénable des
palestiniens. Ce sont également une réponse à tous ceux-là qui s'adonnent à une
course absurde vers la "normalisation" sans les contreparties consignées dans les résolutions onusiennes et
les accords convenus entre les parties intéressées.
Othman JERANDI
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